Une épée de Sergent d'Infanterie début XVIIIe

Bonsoir chers paléos,

Je vous présente cette belle épée :





Cette épée est entièrement en fer, usée, certes, mais encore en bon état. (il n'y aucun jeu à la poignée.)

Sa poignée en fer est caractéristique d'une "épée de Sergent" : gros pommeau sphérique, deux grands pas d'âne, un arc de jointure classique, court quillon globuleux, deux plateaux de pontats arrondis et légèrement asymétriques.

La lame est lenticulaire et présente des gravures assez usées (on devine un entrelac), et quelques figures géométriques, un soleil, 3 courtes rainures, etc ...

C'est l'habillage de la poignée qui permets de la dater bien avant les modèles de 1756 et 63.
La fusée est en bois est recouverte d'un enroulement de ficelle, lui-même recouvert d'un très mince chagrin noir serré par deux viroles en cuir. Cela donne un aspect "goudronné" à la fusée. Le tout en excellent état, sans manques et sans jeu.

Les épées de Sergents d'Infanterie des règlements de 1756 - 1763 sont également en fer et leur poignée reste identique sur une fusée en bois rainuré sans filigrane, et ont une lame plus large, plus épaisse.

En réalité, il s'agit bien d'une épée de sergent, mais antérieure. Sans doute faite à la fin du règne de Louis XIV.

Une petite visite :

La poignée avec son gros pommeau sphérique surmonté d'un bouton de rivure, ses pas d'âne et sa fusée filigranée de ... chagrin :



Zoom sur le pommeau :



La poignée vue de dessous :



Vue de dessus, on remarque l'embase carrée des pas d'âne :



Deux vues de la lame au niveau des décors :




Enfin, les principales dimensions de l'arme :



Et des pontats asymétriques :



Une petite réflexion sur l'usage du fer pour la fabrication des armes blanches, sabres et épées.
La métallurgie du fer était bien maitrisée et on fabriquait les armes en fer depuis des siècles.
Cependant, avec l'accroissement des effectifs (Aux XVII et XVIII èmes siècles, l'Armée Royale était la plus nombreuse) on assistait à une demande de plus en plus importante.
Au tournant de la guerre de 7 ans, on commença à abandonner le fer, forcément forgé, dans la fabrication des poignées.
L'utilisation du laiton permettait des fabrication beaucoup plus rapides et en série, car on procédait par moulage de laiton fondu.
Par ailleurs, on s'apercevait que l'entretien d'une poignée en fer était toujours délicat, la corrosion s'installant dès l'apparition de la moindre humidité. Défaut grandement supprimé avec le laiton.

Voilà.

J'espère vous avoir intéressés, car ces épées ne sont pas si courantes.

Sur ce, bonne soirée à tous, et à bientôt

Est-ce que j'ai bien compris que la lame est aussi en fer et non en acier ?

belle lame !

Bataireacht a écrit:Est-ce que j'ai bien compris que la lame est aussi en fer et non en acier ?

Bonjour Patrick,

Je n'ai pas la réponse.

Pour ce que j'en sais, le fer pur est un métal plutôt ductile et extrêmement sensible à la corrosion.
Associé au carbone, travaillé à la forge, le fer devient très dur et prend une certaine élasticité, ce qui permettait de faire les premiers ressorts, par exemple.

La lame de cette épée possède un décor en creux. Est-ce doc un fer fondu et moulé ?

Alors les lames d'épées et de sabres, ou même cette lame ... certainement pas en fer pur.
Mais pour autant qu'il y ait ajout (carbone ou autre métal), est-ce de l'acier ?

Les habitués de la métallurgie, Wagram ou Freebird par exemple, devraient nous en dire davantage.

À bientôt

cette arme est bien évidemment à lame en acier et monture "de fer" (improprement puisque du fer pur, à part en labo, on n'en a pas).
On dit par convention "fer" pour un acier doux (faible % de carbone) obtenu soit au bas fourneaux soit par puddlage de la fonte de haut fourneau.
Du fer allié à du carbone (et éventuellement d'autres éléments, mais jusqu'à la fin du XIXe siècle, ces ajouts sont involontaire et dus au minerai) est un acier.

Le décor est soit forgé soit gravé, Jean nous en dira plus (les gouttières parallèles en long sont forgées)

à cette époque, on ne coulait ni le fer ni l'acier, les montures étaient forgées, les éléments soudés les uns aux autres à chaude portée à la forge, d'où l'emploi dès Louvois et sa politique de rationalisation de l'armement du bronze coulé.

Si l'acier est très sensible à la corrosion, le "fer" (très pauvre en carbone donc) y résiste très bien.

Très désirable, cette "épée de sergent" ;

Bravo, encore une bien belle acquisition