Le tir sportif aux armes anciennes, histoire, évolution ...

Bonjour à tous, amis de Paléo.
Voici un exposé destiné à vous aider à y voir plus clair dans un monde très particulier.

En préambule, faisons d’abord un rapide ’tour d’horizon’ sur le tir aux armes préhistoriques, antiques et moyenâgeuses dans l’histoire.

Car le tir existe depuis … la nuit des temps, en fait depuis que l’homme a conçu des armes pouvant lancer un projectile :
- le caillou et la main
- la pierre et la fronde.
- le javelot et le propulseur.
- la flèche et l’arc, puis l’arbalète.

Au Paléolithique, franchement, on a assez peu de traces.
Aucune cible ne nous est parvenue. Pas de coupes ou de médailles.
Quelques pointes de flèche et de sagaies … (parfois plantées dans une vertèbre animale et/ou humaine)

Au Néolithique malheureusement c’est pareil, pas de trace des différents concours ni de trophées.
On a toujours des pointes de flèche et quelques bouts de propulseurs en os de renne de chez Tekmagix …

Pour l’antiquité orientale, on sait qu’en Mésopotamie assyrienne, les armées avaient des frondeurs et des archers. On a des témoignages sur tablettes cunéiformes : archers condamnés aux lions pour n’avoir pass été foutus de toucher un type à 20 pas. Ca ne rigolait pas sous Assournazirpal II. Donc ceux qui ne voulaient pas finir dans la fosse aux lions avaient intérêt à s’entraîner sec.
Mais là encore, pas d’armes de jet, pas de cibles, pas de scores. Rien.

Pendant l’antiquité Grecque, Romaine et Gauloise mêmes observations.
Le Légionnaire Romain utilisait plusieurs armes de jet, et côté tir sportif, on a les Jeux Olympiques : lancer de javelot.
On possède même les noms de quelques champions inter-Mare Nostrum, dont un certain Obélix, expert en lancer de casque (ou de menhir, on ne sait pas trop …)

On pourrait continuer, le haut moyen-âge, le chevalier Bayard, Guillame Tell, etc …

En réalité, le tir sportif aux armes anciennes n’arrivera que bien après l’invention des armes à feu. Eh oui.

Bref.

Le tir sportif, tout d’abord.

En France, si les premières sociétés de tir apparaissent sous le Second Empire, le tir aux armes à feu ne se démocratise réellement qu’à partir des années 1880, dans l’élan de la revanche.
Partout des clubs sont crées pour apprendre aux jeunes français à tirer.
C’est la naissance de l’Union des Sociétés de Tir de France qui deviendra beaucoup plus tard la Fédération Française de Tir que nous connaissons.

Le tir aux armes anciennes.

Le tir aux armes anciennes est - forcément - plus récent.
1935 aux USA : naissance de la NMLRA, la National Muzzle Loading Rifle Association.
1952 en Angleterre : création de la MLAGB, la Muzzle Loaders Association of Great Britain.
1962 en France : création des Arquebusiers de France, les ADF.
1971 : 1ère rencontre « informelle » internationale de tir aux armes anciennes à Vaudoy en Brie, à l'origine de la création du MLAIC (voir plus haut)
1972 : 1ère rencontre internationale MLAIC en Espagne.

Il faudrait aussi s’entendre sur le terme d’arme ancienne.
Serait une arme ancienne …
- Toute  arme se chargeant par la bouche. Vision « américaine » et MLAIC.
- Ou toute arme n’utilisant que de la poudre noire et des projectiles en plomb. Vision ADF Française.
- Ou toute arme ne concernant qu’une période définie. Vision de la NSSA (North South Skirmish Association) et de la guerre civile américaine.
- Ou toute arme antérieure à une date définie.
Le débat n’est pas clos.


MLAIC - FFTir et ADF

Il faut parler du MLAIC, acronyme du Muzzle Loaders Association International Commitee. Il ne s’agit pas d’une association de pratiquants mais d’un comité qui réunit les délégués des différentes nations organisant un circuit international de tir aux armes anciennes.
Ce comité fut créé à la suite de la toute première rencontre internationale de tir aux armes anciennes, rencontre informelle ayant eu lieu à Vaudoy en Brie en 1970 à l’initiative … des Arquebusiers de France.
Le MLAIC a établi une suite de disciplines et de règles en s’inspirant largement des règles et disciplines alors pratiquées chez les ADF.
Le règlement et les disciplines du MLAIC sont toujours intégralement reprises par la Fédération Française de Tir.

En France, c’est la FFTir qui gère le tir sportif aux plans réglementaires, d’une part, et purement sportifs, d’autre part : licences, règlements, clubs, épreuves, … donc le tir sportif aux armes anciennes est régi à sa sauce.
Les épreuves « armes anciennes » de la FFtir sont conformes au règlement international édicté par le MLAIC.


Passons maintenant aux disciplines de tir aux armes anciennes tant MLAIC/FFTir que ADF.

Premier principe général : toutes les armes n’utilisent que de la poudre noire manufacturée.
Deuxième principe général : toutes ces armes ne tirent que des projectiles en plomb.

Les catégories de disciplines :

Il y a plusieurs catégories de disciplines en armes individuelles. (Hormis les armes de chasse pour les épreuves de plateau.)
(Il n’y a pas (encore) de discipline en armes collectives genre fauconneau, ribaudequin, canon de 4, caronade de 12 …
- Les armes longues : mousquets, fusils, mousquetons, carabines.
- Les armes de poing : pistolets, revolvers.
Ces catégories existent en épreuves hommes / dames / individuels / par équipe.

On distingue entre « armes libres » et armes réglementaires »
Arme réglementaire : arme resté dans sa configuration d’origine SANS MODIFICATION DES ORGANES DE VISÉE/DÉTENTE/MONTURE.
Arme libre : arme équipée de systèmes de visée élaborés faits avant 1900 (dioptres, tunnels) de détentes élaborées (stecher), d’appuis (pommeau). En fait, toute arme non réglementaire.

On distingue aussi le mode de fonctionnement de ces armes.
Les armes à mise de feu par mèche incandescente : « Armes à mèche »
Les armes à mise de feu par action d’un silex sur une batterie :« Armes à silex »
Les armes à mise de feu par percussion d’une capsule/amorce posée sur une cheminée : « Armes à percussion » (Et non à percution comme on en voit tant sur Natoura...)

Dans ces catégories, on distingue entre les armes d’origine et les répliques.
En règle générale, origines et répliques concurrent dans les mêmes catégories, mais toujours avantage à l’origine en cas d’égalité.

En vrac, voici les principales catégories qui diversifient les disciplines armes anciennes :

Dans toutes les épreuves, on distingue les positions de tir :
- couché
- debout
- à genoux (Je n’en parlerai pas car disciplines rares et absentes en ADF)

On distingue entre les armes lisses ou rayées.

On définit les distances de tir :
- 25 mètres
- 50 mètres
- 100 mètres
- au-delà de 100 mètres (Je n’en parlerai pas, ça nous emmènerait trop loin …)

Mais aussi en fonction de leur mode de chargement :
- par la bouche du canon.
- par la culasse (uniquement en ADF)

On parle de plusieurs types de projectiles toujours en plomb quel que soit le calibre ou type de canon (lisse ou rayé):
- balles rondes
- balles oblongues
- balles oblongues à embase creuse

Au niveau ADF,  dans les armes à chargement par la culasse, on distingue entre :
- les armes à mise de feu par aiguille : systèmes Chassepot ou Dreyse.
- le armes à mise de feu par percuteur : systèmes Rolling Block, Snider, Berdan, Gras, etc …

Et entre les différentes cartouches :
- cartouches en papier
- cartouches rigides en carton et culot métallique
- cartouches entièrement métalliques

Enfin, il y a plusieurs types de bourres et de patches, mais tous doivent être en matériau naturel (sciure de bois, liège, semoule, tissu, papier…)

Insistons sur les disciplines MLAIC/FFTir qui ne connaissent QUE LES ARMES À CHARGEMENT PAR LA BOUCHE.
Les épreuves ADF prennent en compte les armes à chargement par la bouche ET par la culasse. Différence importante.
Le tir aux armes transformées, à l’exemple des fusils Snider, n’est possible qu’en ADF.
Le tir aux armes à aiguille, à l’exemple du Chassepot, n’est possible qu’en ADF.
Le tir aux armes à chargement par la culasse et cartouches métalliques, à l’exemple du Remington 43 Egyptien, n’est possible qu’en ADF.

Autres différences.
En FFTir/MLAIC, l’usage de tenues modernes, vestes et chaussures de tir, est accepté. C’est interdit en ADF.
En ADF, la seule position de tir debout acceptée est le tir à bras francs, coudes et bras détachés du corps.
En FFTir/MLAIC, on peut prendre des positions modernes avec appui des bras et des coudes sur le corps.
En règle générale, les ADF privilégient les usages anciens et proscrivent les tenues et positions modernes.

Mais … quel que soit l'environnement, les épreuves se font en 30 minutes, pour le tir de 13 coups dont seuls les 10 meilleurs seront comptés pour le score.
Les règles de sécurité et de discipline sont les mêmes.

Pour synthétiser ce qui vient d’être exposé, voici 3 tableaux comparatifs.
Juste pour avoir une idée générale.
Ces comparaisons sont établies ‘à la louche’ vus les nombreuses différences entre tenues, positions, nettoyage ou pas entre les coups, et même définition des armes réglementaires / libres.  

Voila, ce sera tout pour le moment.
Mille pardons à ceux qui estimerons que je défonce des portes ouvertes.
Mais je pense que cette présentation était utile.

Donnez vos retours, questions, corrections ... le sujet le mérite amplement.

Pour donner suite à certaines demandes, je reviendrai prochainement pour rentrer vraiment dans le détail de certaines disciplines, du moins celles que je pratique.``

ET, n'oubliez pas :


A bientôt

Super, un immense merci !
J'ai déjà appris plein de choses....
Une remarque cependant: les concours de tir avec cibles dédiées apparaissent semble t'il dès le XIII me siècle en Europe, voici un lien très intéressant:
https://fr.wikipedia.org/wiki/Papegai

bel exposé

Bravo ! Beau boulot de synthèse !
Perso, j'ai toujours regretté que le MLAIC ait "oublié" les armes PN à chargement par la culasse (cartouches papier ou métal). C'est aussi tout un pan de l'histoire des armes anciennes.
Mais, me direz-vous, avec un nom comme celui-là....

salut St Etienne   et bravo pour ton énorme travail que je complèterai (comme tu le souhaites)

- j’avais en son temps ouvert  un chapitre sur le tir et il serait bien   "il me semble " de mixer les deux sujets ...

Merci pour cette synthèse.

hello
voici un bon sujet de conversations et je plussoie la remarque de Lone Rider au sujet des armes a cartouches métalliques ,heureusement qu'il y' a les ADF pour relever le niveau .

En Plat Pays, il y a les ABA, équivalent des ADF.
Mais, la fédé officielle a créé depuis plus de 25 ans 2 disciplines officielles avec championnats et tout et tout, en cartouches métalliques PN, l'une pour les armes de poing et l'autre, d'épaule.
Dans la 1e, on retrouve des SAA, des Schofield, etc, et dans la seconde, des Sharps, Rolling-Block, Winchester et autres Trapdoor. PN obligatoire, évidemment !
L'avantage, c'est que beaucoup de tireurs qui ne pratiquent pas les disciplines MLAIC, viennent à ces concours en remplaçant leur PSF habituelle par de la PN. Et ils s'amusent comme des fous sans devenir véritablement des tireurs PN.
Par contre, rien pour la cartouche papier....

et encore !!!
pour remercier notre ami Saint Étienne et confirmer ses sources   : une médaille de tir un peu ancienne éditée sous le règne de LUDOVICUS MAGNUS REX  vers 1670 ..(350 ans)
 Louis  XIV .  au nom des   "CHEVALIERS DE L'ARQUEBUSE DE PARIS "

Merci cher Nato.
La médaille de tir est ... magnifique ! et il fallait la dénicher.  
Les ADF ont eu des prédécesseurs au Grand siècle.

Mais peut-être que la date est sans doute plus tardive.
En tout cas, sur le profil de cette médaille, le roi est ... disons assez âgé.
Mais cette confrérie existait sans doute avant.

Voici un écu dit "aux 3 couronnes" portant la date de 1709 :


Comparer les portraits.

Magnifique voyage dans le temps (ne nécessite pas encore d'attestation) merci !
Je vous encourage à aller encore plus loin dans le passé....c'est fascinant.....