Un beau fusil d'Infanterie Modèle 1822 T Bis

Rebonjour la compagnie,

Me voici de retour en compagnie d'une arme tellement connue et tellement vue, revue et re-revue que j'ai longuement hésité.

En gros, le 22 T Bis, vous en connaissez tous déjà des palanquées, des fagots, des tas ....

Celui-ci ne sera que mon 3ème. (et je pense n'avoir pas épuisé le sujet)

Mais c'est vraiment le plus beau fusil Mle 1822 T bis que je connaisse. Le voici :


Je ne reviens pas sur l’histoire de cette arme. Je l’ai déjà présentée ici :
http://graphistoire.eklablog.com/le-fusil-de-voltigeurs-modele-1822-t-bis-a105521166

Il s’agit d’un fusil de fin de production.
En effet, il a été fabriqué à la Manufacture Royale de Saint Etienne en 1839. C’était un fusil de Grenadier, long d'1,471 mètre.

Il est retourné à St Etienne pour réparer sa crosse. Ce qui lu a valu un macaron particulier que vous verrez plus loin.

Vers 1843-44, il a été expédié à la Manufacture Royale de Tulle pour y subir la transformation T.
Pour rester bref : la suppression du système à silex, et mise à la percussion.
Mais …. Il tire toujours la même balle ronde de 17,2 mm.

Enfin, en 1859, il retourne (à nouveau) chez lui - à St Etienne - pour sa transformation Bis portant principalement sur le rayage de son canon : 4 rayures plates, hautes de 0,3 mm, larges de 7 mm, au pas de 2 mètres.
Le calibre est porté à 18 millimètres.
Un nouveau cran de mire est posé, réglé pour la distance de 300 pas.
Au passage, le fusil est raccourci aux dimensions des anciens fusils de voltigeurs, il mesure désormais 1,42 mètre, comme tous les fusils d’Infanterie. (Il n’y a plus de fusils de voltigeurs ni de grenadiers, sauf à la Garde Impériale)

Suite à cette 2e transformation, le fusil sera expédié ... au fin fond du dépôt d'une obscure Garde Nationale Sédentaire ou il sera consciencieusement oublié. C’est tant mieux pour le moblot de 1871 qui n’aura pas été à la riflette avec une telle antiquité, et pour nous qui pouvons le recevoir dans un état splendide.

Maintenant, place au reportage.

Le fusil vu de gauche.


La crosse et la platine.
Le bois sélectionné pour la monture est une magnifique loupe de noyer.


Côté gauche, la joue de crosse montre également un très beau veinage :


L’ensemble sous-garde - pontet - anneau de bretelle :
Cette vue permet de voir le parfait encastrement de la platine.


La platine.
On distingue la pièce d’obturation du logement du bassinet.
Fraicheur du marquage et du poinçon de réception N :


La platine, on remarque ici la forte épaisseur de cette pièce.
Notez les marquages apposés sur le canon :
- un petit P étoilé dans un poinçon en losange,
- les initiales MR pour Manufactures Royales,
- le millésime de fabrication 1839.
- un C couronné dans un poinçon ovale.
- le n° 18 que nous retrouverons sur le chien et certaines pièces de la platine.


L’intérieur de la platine, les différents numéros d’ouvrage, dont le 18 que nous avons déjà rencontré sur le canon.
Hormis la pièce d’obturation du bassinet, aucune modification n’est intervenue.
Et toujours un état neuf.


Sur le pan gauche du canon, les poinçons de réception du canon
- un B mal frappé dans un ovale
- un M couronné dans un ovale
- le marquage réglementaire C de I8 pour “Canon de 18“ (millimètres)
A noter que l’arme n’a pas reçu de matricule. Elle n’a dont certainement pas été attribuée à un corps de troupe.
La queue de culasse porte le nouveau cran de mire, assez haut, pour la distance de 300 pas.
Le millésime 1822 T bis a été visiblement refrappé sur l’ancien 1822, à moitié effacé par le cran de mire.
Au niveau de la poignée, le n° 21 profondément marqué est une marque de crossier.


Le marquage de la transformation Bis, S.1859, est normalement caché par la platine.
La majuscule E, déjà rencontrée au même emplacement sur un autre 1822 T bis.


Voici les marquages du côté droit.
La crosse ne porte pas (?) de macaron de réception ni de cheville en buis poinçonnée MR.
Mais on y trouve l’historique des trois interventions qu’a subi le fusil.
- le macaron de l’atelier de réparation de St Etienne, lors de la réparation de la poignée.
- la mention TULLE, manufacture ayant procédé à la mise à percussion lors de la transformation T.
- la mention St ETIENNE, manufacture ayant fait le rayage du canon pour la transformation Bis de 1859


Agrandissement du macaron correspondant à la réparation de la poignée de crosse.
Nous avons le coq de la Monarchie de Juillet, entouré de la mention “(atelier) DE REPAR (ation) DE St ET(ienne) …“ et la date 18..


Sur la crosse vue de gauche et la joue, ce marquage PR (P inversé) ou 4R :


La crosse à droite montre ces trois poinçons :
- A couronné
- D couronné
- M


Derrière l’esse de contre-platine, un marquage très appuyé P et N (ou I ?)


Le fusil a été accidenté alors qu’il venait d’entrer en service. Une maladresse (choc, chute …?) a fait apparaître à la poignée une fêlure au niveau d’un nœud de la monture.
L’atelier de réparation de St Etienne a posé une broche en fer pour renforcer cette zone, la sous-garde assurant également un rôle d’attelle.
Ici, la broche est visible dans la saignée de la poignée, de même que la fêlure côté droit.


Poursuivons notre visite.
Ici, la capucine et son ressort à épaulement.


La grenadière et son ressort :


L’embouchoir, la baguette Mle 1847, le guidon et le tenon de bayonnette.
Toutes les garnitures portent le poinçon H :


Le canon et ses 4 rayures plates.
Assez terne, mais pas usé, le canon a conservé son calibre :
17,70 au sommet des rayures
18,03 au creux des rayures.


Le fusil Mle 1822 T Bis, comme toutes les armes à chargement par la bouche en service en France tirait une cartouche.
Composée autour d’une balle à jupe de 17,2 mm de diamètre, je la charge de 5,5 g de PNF1.
La balle utilisée était d’abord la balle à jupe Mle 1857.
Très médiocre par sa précision, cette balle sera remplacée par la balle à jupe Modèle 1863. C’est cette balle que j’utilise à son calibre nominal.
L’épaisseur du papier enroulé autour de la balle de 17,2 mm compensait le diamètre du canon (18 mm)

La balle 1863 pèse 36 g :




Enfin, accessoire indispensable pour tout assaut “à la française“, la bayonnette. Ici, du modèle de 1822.




Comme vous aurez pu le constater, ce fusil est magnifique.
Une loupe de noyer bien veiné, normalement réservée aux armes de chasse de luxe, un joli macaron au coq, de beaux marquages, des garnitures impeccables.

Ce fusil a traversé plusieurs régimes, de Charles X en passant par Louis-Philippe, de la Seconde République au Second Empire, chaque époque ayant laissé ses traces sur l'arme.
Un poinçon, par-ci, une modification par là ... les armes anciennes sont autant de petites encyclopédies qui composent une histoire parfois oubliée. Mais qu'elles se font un devoir de nous rappeler.

Question utilisation, comme on l'a vu, je tire à la cartouche papier, recherchant davantage la proximité avec le soldat du temps que la performance sportive.

A bientôt

Je viens de passer 5 minutes de pur bonheur grâce à toi...merci !!!

idem pour moi mais une petite question pour quoi une balle de 17,23 j'utilise pour un 1842 t même calibre une balle de 17,8 sans calpin et sa marche pas trop mal je joindrais une photo

voici le moule avec sa balle

Pourquoi ?
1 parce que j'ai eu ce fusil AVEC un moule Mle 1863 fait à l'identique en 17,2  (Pour ceux qui connaissent : fait par Chrishill)
Et que j'ai envie de tirer comme on le faisait jusqu'en en 1865.
2 J'ai déjà un moule en 18, au profil de la balle 1854. Je l'utilise sur mon fusil 1853 TCar et, en effet, ça rentre.

On sait qu'une balle creuse (minié) fonctionne au mieux quand elle est au calibre du sommet des rayures moins 3 centièmes.
Mais, en 1860, on tirait une balle en 17,2 dans un canon en 18 parce que TOUTES les cartouches étaient en papier, en plusieurs révolutions autour de la balle. La balle était alors chargée AVEC le papier autour après avoir déchiré la cartouche et vidé la poudre au fond du tube.
La même cartouche était tirée par TOUTES nos armes à feu : fusils 1822Tbis, fusils 1842T, fusils 1853T et TCar, fusils 1854, fusils 1857.
Seules les carabines 1853T et 1859 tiraient une balle spécifique, plus lourde, la balle 1859 qui elle aussi était en 17,2. La charge de poudre était plus forte.

Le moule et la balle que tu as c'est une réplique de la 1859 en plus léger et en 17,8 mm.
Cette balle est conçue pour le tir sportif MLAIC et ADF.

Là, sur CE fusil, je ne fais pas de tir sportif. Mais du tir "à l'ancienne" juste pour mon plaisir et mes sensations.

Lorsque je fais du tir sportif en origine, j'utilise mon 1853 TCar ou ma Carabine 1859.
Capricieux, mais plaisants.

exact j'avais usiné se moule a l'époque pour un 1822 t bis si mes souvenir sont bon en 1980 pour un concours des adf

Un seul mot, parfois galvaudé, mais qui trouve là tout son sens:

MAGNIFIQUE

et le texte d'accompagnement est un plaisir à lire


Tout comme toi, j'affectionne, dans la mesure du possible, d'utiliser les armes "réglementaires" selon les conditions d'époque, avec des munitions proches, si possible également....

Ça participe à mon plaisir de tirer (et permet "aussi" de masquer (partiellement) mes qualités de tireur de plus en plus médiocre derrière le prétexte de "l'authentique" )

Merci pour ce bel exposé, et les photos de cette très belle arme (et moi, ben, j'en ai pas un seul, de tout ce "fagot" dont tu parles !       )

toujours le même plaisir à lire les post de St Etienne , un régal !

hello
il est vraiment superbe ,félicitations pour cette belle trouvaille
amicalement
cro

LA GRANDE CLASSE !

nous avions évoqué le sujet  , trop vite comme dab et ensuite j'ai perdu mon post....
MAIS quitte à paraphraser jepp , salut jepp ..je vais aussi dire que ton post est magnifique ..comme le fusil !

-à propos des fusils 1822 Tbis , j'ai aidé F Crozet à en trouver un assez neuf ...et même assez beaucoup neuf dont j'attends la présentation ...

BRAVO PAUL .

PS: j'avais commencé un répertoire des poinçons frappés sur les crosses des différents fusils et particulièrement les 1822T bis qui ont subi tant de transformations ..

PS: j'avais commencé un répertoire des poinçons frappés sur les crosses des différents fusils et particulièrement les 1822T bis qui ont subi tant de transformations ..

Il eu un temps où au fil des pages du web, j'avais fait cette découverte,  je me suis empressé de l'archiver, j'en ai fait profiter quelques membres des forums que je fréquentais et malicieusement, l'archive a disparue ??? et jamais été retrouvée (encore un mystère de l'informatique !)

Je viens de chercher à nouveau sur une clef USB qui traînait au fond du tiroir de mon bureau et j'ai "remis" la main sur ces deux pages (qui concernent les revolvers PN!) mais pas les poinçons des 1822 Tbis . Je les dépose ici des fois qu'il y aurait des intéressés !!!

Le 1822 ! le T, le T Bis, les 1822 et toutes les variantes…
Le pistolet, le fusil…
De quoi écrire des encyclopédies. Et comme chaque arme est bien souvent un livre à elle seule, le sujet est infini.
Ce qui est moins infini de nos jours est la chance de tomber sur un bon sujet.
On en voit de partout, dans les salles des ventes, les sites spécialisés, les bourses mais des beaux, des bons, ça devient rare, même très.
Et il faut souvent compter sur les yeux très aguerris des sachants de cette science pour tomber en arrêt sur une belle pièce.
Je vous présente ce très bel exemplaire recueilli à l’issu d’une partie de chasse d’un très fin limier de la meute, le plus fin sans doute qui se reconnaîtra.
Quel nez faut-il avoir pour renifler sous la rouille le « bel objet ». Aussi sûr que celui d’un setter prenant la coulée d’une bécasse dans la mousse humide du sous-bois.
Après, c’est un plaisir de passer de très longues heures à tirer de long au plus juste et de dévoiler l’histoire des hommes de labeur et des hommes de guerre qui ont manipulé l’objet.
Un beau livre qui s’ouvre !







































et je suis désolé pour les photos qui ne veulent pas obéir!!!!

et bien sûr nos amies les vis.

Un grand merci pour ces très belles photos...!!!

je rencontre aussi le problème avec les photos à mon avis c'est Servim qui n'en fait qu' sa tête, je ne pense pas que l'ont puisse régler les paramétres ????

Le mien encore jus de stockage

Mmhmmm....pas mal non plus !!!

oui même si un peu de boulot pour lui refaire une jeunesse !!!

J'ai commencé le travail a savoir changement de la noix d'origine car pour tirer il me fallait exercer une force sur a détente environ de 6 kg.
Ma nouvelle noix d'origine aussi a réduit le poids à 1,5 kg,maintenant je vais m'occuper de l'esthétique a savoir le tube,la baguette et les diverses ferrures.Le bois étant uniformément chocolat je le laisse ainsi.

Bon courage....et bons tirs plus tard

oui pour moi le bois est bien dans cette patine!

capoulat a écrit:Le bois étant uniformément chocolat je le laisse ainsi

Ah ? Dommage.

Pourtant tu as déjà bien fait revenir la crosse ... le bois sera magnifique dans sa robe brun rouge.

Pour le tir, effectivement le poids de détente ... est résolu. Pour ce qui est de la hausse, comment fais-tu ?

A bientôt

fcrozet a écrit:Le 1822 ! le T, le T Bis, les 1822 et toutes les variantes … Le pistolet, le fusil…
"........ le très fin limier de la meute, le plus fin sans doute qui se reconnaîtra.

Je crois bien qu'on connaît le même très fin limier de meute .... !

Parfois, sous la crasse et la gadoue, se cache ce qui s'avère être une pépite du plus bel or.
Ca m'est arrivé. Rarement.
Il y en a des grandes, il y en a des petites.
Mais le plus fort, ce qui est incroyablement exaltant et fabuleux, c'est de découvrir progressivement, marquage après poinçon, que c'est une pépite.
La dernière fois, c'était il y a 2 semaines.
Un de ces jours, je vous montrerai une de ces pépites.

Pour la hausse pour être dans le ton avec les A D F je vais coller une plaquette un peu plus haute et a ajuster sur le pas de tir si je le vends un jour il n'y aura qu'a décoller la plaquette,je n'ai pas nettoyer la crosse elle est dans son jus.